Lian Hearn
Lian Hearn est le pseudonyme d'un auteur pour la jeunesse célèbre en Australie où elle vit avec son mari et leurs trois enfants.
Elle est diplômée en littérature de l'université d'Oxford et a travaillé comme critique de cinéma et éditeur d'art à Londres, avant de s'installer en Australie. Son intérêt de toujours pour la civilisation et la poésie japonaises, pour le japonais qu'elle a appris, a trouvé son apogée dans l'écriture du Clan des Otori. Elle y dépeint un univers imaginaire nourri d'alliances secrètes, de guerres, de clans, d'honneur exacerbé, d'amour, de désir et de courage.
Elle a choisi l'anonymat pour que ce premier roman soit jugé pour lui-même et non en fonction de ses précédentes œuvres pour la jeunesse dont le style était radicalement différent. Elle estime également que l'attention doit être portée sur le livre plutôt que sur l'auteur. La publicité l'a par ailleurs toujours mise mal à l'aise.
En juin 2002, quelques temps après que les éditeurs de nombreux pays eurent accueilli à bras ouverts le livre et que les droits cinématographiques aient été achetés, Gillian Rubinstein admit qu'elle en était l'auteur.
Gillian Rubinstein a choisi son pseudonyme en combinant son surnom d'enfance (les dernières lettres de Gillian) et le nom de famille d'un auteur irlandais ayant vécu au Japon à la fin du XIXe siècle, Lafcadio Hearn.
Lian Hearn avait décidé que la saga des OTORI serait une trilogie. Mais c'était compter sans la force de l'inspiration… « Je n'avais pas l'intention d'écrire plus, mais les personnages sont à nouveau apparus vivants pour moi et j'ai réalisé que j'avais encore beaucoup à dire à leur propos ».
Écrits l'un après l'autre dans un même élan, deux nouveaux volumes viennent encadrer la trilogie : Le Vol du Héron dévoile le destin de Takeo et Kaede adultes. Le 5 ème tome Le Fil du Destin, qui est le volume final, nous fait découvrir la vie de Shigeru depuis son enfance jusqu'à sa rencontre avec Takeo.
INTERVIEW
Dans quelles circo
nstances avez-vous commencé à écrire Le Silence du Rossignol ?
J’ai commencé à écrire Le Silence du Rossignol avec, en tête, les quatre personnages principaux et la phrase d’ouverture dite par Takeo. J’étais alors au village international d’arts d’Akiyoshidai, dans la préfecture de Yamaguchi ; c’était un après-midi moite et humide de septembre. La lumière était pâle et opalescente. L’eau ruisselait des bassins autour de la résidence des artistes, on y voyait les carpes frétiller et, de temps en temps, un martin-pêcheur passer à tire-d’aile. Je prenais des notes dans un carnet avec un stylo à encre-gel noir que j’avais acheté à Himeji. J’ai écrit : “ Ma mère menaçait souvent de me découper en petits morceaux.” Je l’ai changé plus tard par : “ en huit morceaux ”. J’aime traduire littéralement des idiomes japonais pour donner l’impression que le livre n’est pas écrit en anglais.
Comment vous est venue l’inspiration pour décrire cet univers foisonnant ?
Depuis des années je m’initiais à l’histoire et à la littérature japonaises, par de nombreuses lectures ou par le cinéma, ou encore en étudiant la langue. Après plusieurs semaines passées seule au Japon, dans cet endroit idyllique, il me fallait voir si je pouvais donner vie à ce qui dormait au fond de moi depuis tout ce temps. Lentement, le monde des Otori commençait à prendre forme. J’allais souvent au château de Hagi dans la vieille ville du clan des Choshuu. Je visitais des maisons de samouraïs et les musées. Je marchais dans les montagnes qui surplombent le village, à travers les rizières et le long de la rivière. J’essayais partout d’imaginer comment mes personnages pouvaient évoluer cinq siècles plus tôt. Quand je parlais aux gens, je devais les écouter avec une attention particulière, comme lorsque j’étais une petite fille. Je prêtais l’oreille à tout ce qui se disait, tout en restant le plus souvent muette. C’est ainsi que Takeo est né.
Qu’aimez-vous particulièrement dans l’art japonais ?
Dans la littérature et les arts japonais, c’est l’utilisation du silence et de l’asymétrie qui me fascine. (…) Je voulais voir si je pouvais utiliser le silence dans l’écriture. Le style est donc dépouillé, elliptique et suggestif. Ce qui n’est pas dit est aussi important que ce qui est énoncé.
Qu’est-ce-qui vous intéresse dans la société que vous décrivez ?
Je m’intéresse au système féodal. Quand la démocratie et l’état de droit sont ébranlés, les sociétés humaines semblent retourner au féodalisme. Je voulais écrire un “ conte fantastique ” ancré dans une société féodale, mais je voulais que mes personnages soient réels avec des émotions d’autant plus intenses qu’elles sont contenues par des codes de conduite très stricts. Il n’y a pas de méchants dans le sens traditionnel du terme dans mon histoire, il n’y a que des antagonistes. Iida Sadamu et Otori Shigeru appartiennent à la même classe sociale. Iida a été corrompu par le pouvoir alors que Shigeru est d’une nature compatissante mais, au fond, ils se ressemblent. De même que l’un n’est pas un monstre, l’autre n’est pas un superhéros. Mes personnages recherchent le pouvoir, ils ont des défauts et commettent des erreurs, mais ils aiment la vie et profitent de tout ce qu’elle peut leur offrir.